un régulateur armé par la loi, silencieux à l’antenne
Par la loi « SREN » (21 mars 2024), la France a désigné l’Arcom comme coordinateur des services numériques (DSA), aux côtés de la CNIL et de la DGCCRF. Concrètement : traitement des plaintes, désignation de signaleurs de confiance, centralisation des injonctions et, en dernier recours, sanctions contre les acteurs établis en France. Pour les très grandes plateformes, la Commission européenne peut infliger des amendes jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial.
« En cas de non-respect, la Commission peut aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial. »
— @Arcom_fr
Fin 2024 et début 2025, des décrets ont précisé les pouvoirs d’enquête de l’Arcom : auditions, inspections sur site, demandes d’injonctions judiciaires.
alerte officielle dès février 2025 : la LDH a saisi l’arcom
Le 10 février 2025, la Ligue des droits de l’Homme a saisi l’Arcom pour signaler des manquements graves de Kick, citant directement la chaîne « JeanPormanove » (humiliations, violences, atteintes à la dignité). Cette saisine mettait déjà la plateforme et, par ricochet, le régulateur, face à l’ampleur du risque.
« La LDH a saisi l’Arcom face à la modération laxiste de Kick. »
— @LDH_France
que pouvait faire l’arcom « hier », concrètement ?
Dans le cadre du DSA, l’Arcom peut transmettre les plaintes vers le coordinateur compétent si le service est établi à l’étranger, coordonner des injonctions de retrait d’illégaux et exiger des informations aux intermédiaires opérant en France. En parallèle, le DSA impose aux hébergeurs/plateformes des mécanismes de signalement rapides et, surtout, une notification aux autorités judiciaires en cas de soupçon d’infraction portant atteinte à la vie ou à la sécurité de tiers (art. 18) : le régulateur peut en contrôler l’application.
« Auditions, inspections sur place, injonctions : la boîte à outils est prête. »
— Hogan Lovells (31 janv. 2025)
précédents : quand l’arcom agit vite (et fort)
Sur le piratage sportif, l’Arcom a déjà démontré sa capacité d’action : 8 505 noms de domaine bloqués depuis 2022 (au 30/04/2025) et plus de 10 000 blocages cumulés (décisions initiales + notifications). Autrement dit, des dispositifs d’urgence existent et sont opérés à grande échelle quand le cadre juridique est clair.
À la tête de l’institution depuis le 2 février 2025, Martin Ajdari hérite d’un dossier ultrasensible : un streaming à très forte audience, des soupçons d’illégaux répétés, et un drame en direct qui pose la question de l’intervention en temps réel.
le nœud du scandale : droit, délai… et frontière
Trois obstacles expliquent la lenteur perçue : la territorialité (plateforme hors UE ? alors coopération transfrontière), la preuve (qualification pénale et imputabilité) et le temps procédural (de la plainte à l’injonction). Mais le cadre existe, et il s’est durci : l’Arcom peut enclencher des procédures DSA, tandis que Bruxelles garde la main sur les géants déjà désignés « très grandes plateformes ».
et maintenant ?
L’Arcom peut-elle rester muette après une alerte formelle et un drame planétaire ? Entre pouvoirs nouveaux et pression publique, la question est moins « pouvait-elle ? » que « quand agira-t-elle ? ». Prochaine étape : injonctions, sanctions… ou un séisme réglementaire ?
